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Je me réveille tôt ce matin là. Je jette un oeil à la fenêtre. J’aperçois les montagnes. Magnifiques. La lumière a déjà changé. Elle est plus blanche. Cela donne de nouvelles couleurs aux paysages. La brume s’est enlacée au petit cours d’eau qui coule dans le fond de la vallée. C’est la première fois depuis l’été. Les colchiques ne tarderont pas à tapisser les prairies. Le soleil est encore chaud à cette saison et son apparition dissipe rapidement ce voile de brume. Chaque nouvelle journée passée fera grandir cette couverture de brouillard et le petit ruisseau se lèvera de plus en plus tard dorénavant.

Le petit hameau dans lequel je réside domine les environs. J’aperçois le petit lacet de route qui s’entortille menant à ce cul de sac. Un convoi de véhicules s’y est engouffré. C’est inhabituel. Je me demande ce que cela nous réserve. Probablement une horde de marcheurs. 

J’ouvre la fenêtre et décide de me prélasser dans un nouveau livre reçu hier. Le café parfume la pièce. Le soleil inonde le salon. Allongé dans ce canapé, je suis bien.

L’église du hameau en rythme la vie. A des horaires dont je n’ai jamais cerné la signification, 7h50 puis 11h45 et enfin 17h00. Probablement liées à des faits agricoles d’antan. 

Alors qu’il est 9h20, les cloches se mettent à sonner avec insistance. Longuement. Je comprends alors que ce convoi de véhicules n’était en rien un groupe de marcheurs. C’est le glas que l’on entend sonner. 

Cela vient teinter différemment cette journée qui s’offrait si belle. Je décide de replonger dans mon livre et d’ignorer cette ambiance pesante à quelques pas de mon domicile. 

Pourtant une trentaine de minutes plus tard, les oraisons funèbres jaillissent jusque dans la pièce. Il m’est impossible d’y échapper. Le cimetière est en contrebas de mon habitation à moins d’une centaine de mètres. Et le silence qui règne en cette matinée accentue les voix qui se succèdent. Les discours sont émouvants. Poignants. Je comprends que la personne célébrée est une jeune femme de 28 ans décédée d’un cancer foudroyant. Sans connaître cette personne, je suis invité malgré moi à célébrer son départ. Tous saluent son courage dans la maladie, sa vie heureuse et gaie, et nous invitent à être joyeux en cette journée, ce qu’elle souhaitait. Pourtant, je ne parviens pas à réprimer le noeud qui enserre ma gorge. 

Je sais l’absurdité de la situation. Une nouvelle fois, je choisis de me replonger dans ce livre, heureusement passionnant.

C’est maintenant une douce mélodie de piano qui parvient à mes oreilles. Cette musique ne m’est pas étrangère, j’en écoute l’album depuis 3 mois en boucle. Dans la voiture, à la maison, au casque en marchant. Et je l’entends là maintenant, au point que je me demande un instant si cette musique n’émane pas de ma chaîne. Non. Le son vient bien du cimetière.

Les évènements me relient à ce décès et je n’en comprends pas le sens. Je suis véritablement remué.