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Demain, une nouvelle étape du chemin de Compostelle nous attend Rebelle et moi. Celle qui nous fera traverser le plateau de l’Aubrac. Souvenirs d’enfance, des poilades avec ma sœur en voyant une serveuse servir de l’Aligot, que nous découvrions, qui ne parvenait pas à s’en sortir avec les fils de cette délicieuse purée.

Voici le chapitre 14. Les chapitres précédents sont disponibles sur ce site. Ils le sont par le menu en haut à droite de cet écran dans la section blog. Bonne lecture. 

 

Rebelle et moi avons pris notre rythme. Dès 5h30, parfois 6h, nous sommes sur les chemins. Le jour est déjà levé. Et nous sommes seuls. Je suis le seul humain sur ces routes. L’activité des animaux est elle déjà bien engagée. Il y a chaque matin une grande compétition de pépiements organisée et tout le monde participe. Gaiement. J’ai même parfois un petit oiseau qui m’accompagne de branche en branche. Ou mieux encore, en vol au dessus de moi qui me parle d’actualités très locales. Les renards sont fréquemment de la partie. Ce matin, un lièvre nous a repéré de loin, et j’ai mis du temps à comprendre quel animal il était. Il était aussi gros qu’un chien moyen et ne semblait pas particulièrement effrayé de notre arrivée. Il avait raison, nous ne souhaitions rien d’autre que de l’observer. Les fleurs, à cette époque sont splendides. Des coquelicots encore parsèment les talus et les champs que nous longeons. De jolies fleurs bleues dont j’ignore le nom mais qui semblent favorisées par les épis de blé. Et des genêts magnifiques. Jaunes spectaculaires. Les lumières à cette heure sont encore discrètes mais les genêts semblent vouloir s’illustrer. 

Les pélerins sont absents, mais à partir de 9h, je commence à en croiser quelques uns. Ils ont démarré d’un autre lieu. Cela dit rarement. Chacun son rythme et ses étapes. Beaucoup de personnes assez âgées, dans la fleur de l’âge de la retraite. Quelques tout jeunes de vingt plus rares. Et des entres deux comme moi dont la majorité est composée de femmes voyageant seules ou à deux.  Il est de bon ton de se tutoyer, nous sommes une et même seule famille. Les gens s’abordent facilement. Le contact est généralement bon. Mais cet à priori bienveillance est aussi parfois l’obstacle à des discussions plus profondes. Au final, on recroise fréquemment les mêmes personnes et les contacts finissent pas se faire. On partage une expérience similaire. Bien sûr la durée ou l’objectif final classifie malgré tout les pèlerins. Le poids du sac est un sujet récurent, d’autant que beaucoup se font transporter par navette le contenu de leur sac jusqu’à l’étape suivante. Rebelle et moi sommes en autonomie et bien trop chargé. 24 Kgs comprenant l’eau et les croquettes. Je vais devoir m’alléger dans les jours suivants. L’activité préférée du pèlerin est de poser sa pierre à l’un des innombrables Kern présents sur le parcours.

Les paysages parcourus sont la plupart du temps splendides. De la  campagne vallonée, dont les villages n’ont sans doute pas changés ces deux derniers siècles. Les maisons sont encore habitées pour la plupart. En revanche les commerces sont éteints, en vente. Les jeunes désertent. Pourtant c’est beau. Et sans doute agréable à vivre. Je ne peux m’empêcher de m’y projeter. J’y finirai, c’est presque sûr. 

Le temps nous joue de sacré tour. Nous avons été plutôt chanceux et n’avons essuyé que deux fois des pluies intenses. Mais nous avons échappé à d’énormes orages de grêles qui ont duré près de quatre heures. Quelle chance de ne pas avoir été dessous, ce qui était le cas de nombreux pèlerins.

J’ai fais la connaissance de Benjamin, de Francis et bien d’autres. Ce matin, j’ai longuement conversé avec François, photographe de métier qui a vécu de longues années au Mexique et dont l’activité principale semble être de faire des treks…

Demain, nous nous apprêtons à traverser le plateau de l’Aubrac. Un secteur que j’affectionne particulièrement.