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Je croise Romain dès le début de mon périple. A la fin de la première étape. Il est jeune. Une vingtaine d’année. C’est un jeune et beau garçon. Le teint mat, les cheveux noirs, de jolis yeux foncés et les dents blanches. Deux belles lèvres bien rouges fixant un sourire. Plutôt musculeux et un peu ramassé. Il doit assurément plaire à ses congénères. Nous sommes deux tentes installées dans ce camping et il me demande s’il peut se mettre à mes côtés. Il cherche à établir le contact. J’avais rêvé de solitude. Je reste assez hermétique. Je ne suis pas venu me faire des amis. Je l’éconduis gentiment. Je le croiserai presque chaque soir de chaque étape. Souvent bruyant. Rieur. Ses comportements semblent excessifs. Il a besoin d’être remarqué. D’être entouré. Il en est parfois pénible. 

 

C’est finalement après deux semaines et demie de marche que nous nous retrouvons ensemble à nouveau. Dans un gîte où nous dinons. Nous sommes huit pèlerins et deux hôtes. Une ambiance exceptionnelle nous lie tous ce soir là. Beaucoup d’humour, de blagues potaches, de réflexions plus profondes nous animent. Ses peurs et ses craintes se masquent derrière des tirades humoristiques. Elles sont récurrentes. Elles sont fréquentes. Sa gêne en est palpable. Il nous interroge. Sous couvert de grande rigolade pour que cette mise à nue soit possible. Ses origines semblent être au centre de son malaise. Il ne sait pas où sont nés ses parents. Probablement en Italie ou en Espagne. Peut-être au Maroc. Mais il semble se dissimuler un secret. Il ne sait pas pourquoi. Il n’obtient pas de réponse à ses questions. Lui et sa soeur ont fait en cachette un test adn leur indiquant leurs origines ethniques. Ils étaient rassurés de se savoir effectivement frère et soeur. Même ça ils en avaient douté. Il cherche également une voie. Il se sent idiot. Et c’est à grand renfort de rires sonores et excessifs qu’il dissimule non pas son idiotie mais sa crainte de l’être. Après des études courtes et difficiles, il s’est orienté vers la cuisine. Métier qu’il n’aime pas. Mais celui qui lui a été proposé. Alors il voyage. Rencontre. Il espère croiser des personnes ayant un goût pour leur métier qui ne s’est jamais tari. Pourtant, presque tous en sont las autour de la table. Ne trouvant de réponses à ses questions, son rire est de plus en plus sonore, la déconnade est sa fuite. 

 

Passé cette première impression, Romain est attachant. Il cherche. Il cherche ses origines et ce que sera sa vie.